Le Soir a fait paraitre dans son édition du 30/12/23 un article sur le business du coaching. Son titre : « Dérives, abus, incompétences, Les coulisses obscures du coaching ». https://www.lesoir.be/557937/article/2023-12-27/derives-abus-incompetences-les-coulisses-obscures-du-coaching
Je remercie Le Soir pour l’article sur le coaching. En tant que fondatrice et directrice d’une académie de coaching, je me sens évidemment concernée par ce qui se passe aujourd’hui dans le monde du coaching. J’aimerais par conséquent répondre à l’article, valider certains chapitres et en nuancer d’autres.
Je souhaite réagir à ce qui a été écrit.
« Secteur non réglementé »
Comme le souligne l’article, cette profession n’est pas encore réglementée, en effet. Ceci génère évidemment des abus et dérives lorsque ce métier est pratiqué par des personnes qui font preuve de peu d’éthique, de bienveillance et de professionnalisme. Heureusement, ce n’est pas le cas de tous les coachs !
Il n’y a rien de « pourri » dans le monde du coaching. C’est un métier fabuleux s’il est pratiqué de manière honnête et juste.
Être coach est un métier à dimension humaine. Cela nécessite par conséquent d’être particulièrement attentif à l’intégralité et au respect du client. Il est essentiel d’être clair sur ses compétences et ses limites de coach et de les clarifier avec le client. Cette attitude du coach nécessite une expertise juste, éthique et professionnelle.
Cela étant, vous admettrez que nous retrouvons ces comportements dans toutes les professions, même dites « académiques ».
« Emprise néfaste »
Lorsque le journal LE SOIR souligne que « certains coachs peuvent avoir une emprise et une influence négative ». Encore une fois, si ces derniers ne sont pas reconnus et professionnels ce n’est pas le cas de tous !
Je suis réellement consternée de lire « agressions sexuelles, arnaques ou manipulations … » dans cet article du 30 décembre… Je rejette totalement ce qui est écrit.
En 15 années d’expérience en tant que coach en entreprise, je n’ai jamais entendu, ni même constaté de telles plaintes.
Notez également que je reçois des clients pour qui, dans 30% des cas, les accompagnements avec les psychologues ont été soit traumatisants, soit inutiles.
Il faut savoir que le coach et le psychologue travaillent souvent en symbiose. Les compétences sont différentes et peuvent être complémentaires. Cette collaboration est par ailleurs obligatoire dans le cadre d’un client/patient qui souffre de traumatismes ou de pathologies diverses. Le coach va traiter le présent et le futur. Le psychologue traitera davantage le passé.
« Autoproclamation comme coach – pas de moyen de vérification »
Lorsque cet article prétend qu’en Belgique, n’importe qui peut se proclamer « coach » du jour au lendemain, cela n’est pas vrai ! Dire qu’il y a des usurpateurs dans tous les secteurs d’activités serait bien plus correct.
Pour répondre à cela, sachez que l’ICF (International Coaching Federation) et l’EMCC (European Mentoring & Coaching Council) sont, à ce jour, les seules fédérations dont les programmes de coaching ont été accrédités par l’Union Européenne (en 2010 et 2020). Ces fédérations ont élaboré un ensemble de compétences de base et un code de déontologie pour les coachs professionnels afin de garantir la qualité et l’intégrité de la profession. De plus, le rodage pratique demandé est intense dans ce processus de formation.
Les certifications délivrées par ces fédérations renforcent la crédibilité et la reconnaissance des diplômés dans le domaine du coaching. La Charte professionnelle du coaching, du mentorat et de la supervision des coachs, mentors et superviseurs a été d’ailleurs acceptée par l’Union Européenne (UE), et figure désormais, dans les bases de données de co-régulation et d’autorégulation de l’UE.
Bien que la charte n’ait pas encore force de loi, elle témoigne d’un effort concerté d’autorégulation de la profession de la part des principales associations de coaching.
La charte de 2022 comprend des mises à jour clés pour garantir que l’autorégulation reste pertinente, en offrant des protections appropriées aux consommateurs et en permettant aux coachs, mentors et superviseurs qualifiés de valider leur crédibilité sur le marché[1]. »
« La certification n’est pas une garantie en soi »
Effectivement, là nous sommes d’accord : ces certifications ne sont pas une garantie en soi.
Quand l’élève en formation de coaching obtient son diplôme, il est fondamental qu’il poursuive son processus d’apprentissage par des supervisions (avec des superviseurs professionnels) ou des mentorats validés, par exemple.
Les coaches certifiés par l’ICF sont tenus de respecter des normes éthiques strictes et de participer à des activités de développement professionnel continu.
Cela garantit qu’ils doivent restent à jour sur les meilleures pratiques et continuer d’améliorer leurs compétences.
C’est aujourd’hui une manière de garantir le professionnalisme du métier de coach et de le protéger des dérives.
« Des tarifs qui choquent certains spécialistes »
Les tarifs des coachs sont fixés par les coachs eux-mêmes. Il n’existe pas de plafonds tarifaires. Cela explique sans doute les différences importantes et les absences de cohérence en termes de tarif chez certains coachs.
Et là à nouveau, tout est question d’intégrité chez le coach.
Il est aussi important de nuancer en différenciant le coaching destiné aux particuliers et le coaching d’équipe en entreprise.
Les employeurs reconnaissent le retour sur investissement quand ils font appels à des coachs et acceptent évidemment des tarifs qui sont de l’ordre de 250€ à 400€/heure.
Une recherche menée par l’International Coach Federation (ICF) en 2009 a montré que les entreprises rapportaient un retour sur investissement moyen de 7 fois le coût initial du coaching.
Une autre étude réalisée par Price Waterhouse Coopers en 2015 (1) a révélé que le ROI moyen était d’environ 7 fois le coût du coaching.
Pour les coachings destinés à des particuliers, la fourchette de prix est entre 40€ et 90€/heure.
Ce qui est moins connu dans le monde du coaching et qui existe :
– de nombreuses missions d’accompagnement destinées à des individus « en situation précaire »
– ou des organisations axés sur des objectifs de développement durable (ODD).
Ces initiatives prouvent ainsi le retour sur investissement social du coaching.
« Des psychothérapies déguisées »
ll est important de noter que le coaching est une approche flexible et personnalisée, adaptée aux besoins spécifiques de chaque client.
Le coach n’est pas là pour donner des réponses, mais plutôt pour poser des questions puissantes, offrir un soutien, et aider le client à trouver ses propres solutions et à progresser vers ses objectifs.
La posture du coach n’est pas de conseiller. Il occupe une position basse sur la relation (bienveillance, humilité, vulnérabilité) et haute sur le processus. Le client est l’expert (contrairement à une démarche thérapeutique). Dès qu’il conseille, il enfreint le code de déontologie.
Un ensemble de techniques comme l’ennéagramme ou la PNL (Programmation Neuro Linguistique) peuvent effectivement soutenir le processus de coaching.
Et tous ces outils/méthodes doivent évidemment être mis au service du coaching avec de la subtilité, de la justesse, du réalisme et selon les situations et les personnes, et dans le respect le plus strict de l’éthique du coaching.
Ce ne sont pas les supports sous forme d’outils ou autres méthodes qui sont dangereux. C’est ce qu’en fait le coach et comment il accompagne son client avec ces outils.
« 80 % des coachs présentent une anomalie en matière de compétences et 20 % usent de pratiquent trompeuses »
Le chiffre de 80% est réellement exagéré. J’inverse les chiffres et dirais que 20% des coachs et des établissements de formation présentent une anomalie.
Et là, il est demandé à l’élève qui souhaite s’inscrire à une formation de coaching d’évidemment vérifier quelle est l’expertise des formateurs, les références, la qualité des certifications délivrées, la pertinence des programmes délivrés, etc
En conclusion: je trouve dommage que Le Soir n’ait pas pris la peine d’interroger des coachs pour avoir leur point de vue sur leur activité. C’eut été, me semble-t-il, faire preuve de déontologie.
Le coaching va encore, selon moi, prendre de l’ampleur dans les prochaines années. Les personnes et les entreprises ont besoin d’être facilités dans leur réflexion et dans leurs actions pour grandir consciemment dans leur vie.
Conseil aux futurs coaches : Quel que soit le chemin et l’académie que vous choisissez pour accompagner les individus et/ou les entreprises, il est vivement recommandé d’exercer votre métier de coach avec loyauté, éthique et professionnalisme.
Conseil pour les clients (nous ne pouvons pas utiliser le terme patient dans notre déontologie): Pour ceux et celles qui souhaitent se faire accompagner, assurez-vous que le coach a suivi une formation de qualité et qu’il poursuit son apprentissage réflexif et pratique.
Je reste à votre disposition pour continuer le débat 😊
Christa Jongen – Coaching+Academy
(1) 2016 ICF Global Coaching Study