Article paru dans Actus & Conseils – Gérer sa carrière
Devenir le chef de ses anciens collègues est un virage difficile à engager. Il y a des erreurs sur lesquelles il faut être vigilant pour ne pas chuter dès ses premiers pas de manager. La suite de votre carrière pourrait en dépendre…. Deux experts nous éclairent sur ces 5 erreurs classiques.
1. Ne pas dire que cela ne « change rien »
La veille, vous parliez de tout et de rien avec eux à la machine à café. Et du jour au lendemain, vous voilà promu au rang de N +1 de vos anciens collègues. Difficile ? « Pas forcément, assure Pierre Bultel, fondateur du cabinet de conseil en ressources humaines PBRH. Il faut juste partir sur de bonnes bases et ne surtout pas leur dire que votre promotion ne changera rien entre vous. »
Ce consultant, auteur du livre Mobilité interne, comment réussir ? constate que c’est l’erreur la plus souvent commise. Un manager qui voudrait se mettre des menottes ne s’y prendrait pas autrement. « Une telle remarque ne vous vaudra aucun respect. Au contraire, elle accrédite seulement l’idée que le chef n’apporte rien ! » Lionel Bellenger, consultant et maître de conférences, confirme. « Ne vous excusez pas d’être là. Si vous êtes arrivé là, c’est qu’il y a une bonne raison… ».
2. Ignorer comment on est arrivé là
Mais justement, quelle est cette bonne raison? « Si vous avez l’occasion et s’il part dans de bonnes conditions, essayez de vous entretenir avec votre prédécesseur », poursuit-il. Même si c’est votre ancien manager, vous êtes désormais sur un pied d’égalité. « Les passations de pouvoir un peu officielles sont aujourd’hui désuètes. Or, elles permettaient de faire le point sur des choses importantes. »
Outre les affaires courantes, c’est l’occasion de lui demander son point de vue sur le fonctionnement de l’équipe, certains rapports de force et les freins qu’il a constatés. » Si, d’un point de vue hiérarchique, un de vos anciens collègues est plus difficile à gérer qu’un autre, vous serez prévenu.
De même, Pierre Bultel recommande au nouveau manager de s’interroger sur les raisons de sa promotion. « En France, on a tendance à accepter une promotion sans trop poser de questions. Or il est important de savoir si certains de vos anciens collègues étaient aussi candidats et pourquoi ils n’ont pas été pris. » Car pour ruiner son autorité naissante, il n’y a rien de mieux que de dire que l’on ne sait pas pourquoi on est là.
3. Préjuger des compétences et des attentes de ses anciens collègues
Cette nouvelle vie qui commence peut s’accompagner d’un déménagement. En effet, vous passerez peut-être de l’open space à un bureau individuel. Attention à la « bunkérisation » du manager. « C’est le moment, justement, de s’ouvrir aux autres, même si on croit les connaître », explique Pierre Bultel. Ce n’est pas parce que vous vous êtes côtoyés que vous connaissez vraiment untel ou unetelle. « Il y a des sujets profonds que l’on n’aborde pas forcément à la machine à café. On ne s’interroge pas toujours sur le parcours ni les attentes de ses collègues alors que c’est le rôle d’un manager de les connaître. En sollicitant un rendez-vous pour évoquer ces sujets, vous entrez dans le costume du manager. »
Pour Lionel Bellenger, c’est aussi une phase d’écoute indispensable. « Pour bien manager, il faut écouter : allez au contact de façon positive et demandez à chacun quelques suggestions. Demandez-leur aussi ce qu’ils pensent de votre nomination et ce qu’ils attendent de vous. »
4. Penser et affirmer que l’on va tout révolutionner
Voici venu le moment de commencer à travailler ensemble. De la première réunion, on dit souvent qu’elle est fondatrice. Nos consultants confirment qu’un faux pas est vite arrivé. « Elle pose les bases sur lesquelles vous allez travailler ensemble, observe Lionel Bellenger. Mais ne tombez pas dans les écueils en multipliant les effets d’annonce. Ne faites surtout aucune promesse que vous n’êtes pas sûr de tenir ! »
Pierre Bultel recommande d’évoquer surtout quelques modalités de fonctionnement. « Inévitablement, on va vous comparer donc essayez de valoriser vos point forts, selon vous, par rapport à votre prédécesseur. Cependant, gardez-vous de faire la révolution. Le mieux est de garder sa propre personnalité, mais surtout de détailler sa mission et sa feuille de route le plus clairement possible. »
5. Faire une différence entre vos anciens collègues-amis et les autres
Reste une question humaine. Comment se comporter avec ses anciens si on a noué de solides amitiés par le passé ? « Il est plus compliqué de faire un pas vers un collègue avec qui on a pu se brouiller que de garder un ancien copain », tranche Lionel Bellenger. Selon lui, il n’y a rien de mal à parler foot avec ses anciens collègues à condition de respecter certaines limites. « Il faut juste harmoniser son comportement, précise Pierre Bultel. Tutoyer tout le monde pour se garder de tout favoritisme et, avec ses amis, rester sur un plan personnel et éviter certains sujets professionnels sensibles. »